Depuis quelques jours, le débat socialiste tourne autour des déclarations de Bertrand DELANOË qui, dans son livre, se revendique libéral et socialiste. La riposte n'a pas tardé : Ségolène ROYAL a estimé que les deux termes étaient incompatibles.
Je dois reconnaître que Bertrand DELANOË a réussi à faire tourner le débat autour de ses affirmations. C'est un succès politique. Il paraît que cette sortie était aussi destinée à séduire les partisans de DSK. Alors, sur le fond, qu'en penser ? J'avoue être partagée. Car si Bertrand DELANOË est dans le vrai au regard de l'Histoire, je ne suis pas certaine que le débat politique du moment consiste principalement à se positionner sur cette question.
Historiquement, Bertrand DELANOË a raison. Tellement raison qu'avant lui, Ségolène ROYAL avait dit la même chose. Dans son dernier livre, Ce grand cadavre à la renverse, Bernard Henri Lévy développe largement cette idée que la conquête des libertés, aux XVIIème et XVIIIème siècles, est un héritage que la gauche démocratique doit revendiquer. Les Lumières, c'est l'affirmation d'une nécessaire autonomie de l'individu et de la société face aux pouvoirs, religieux ou royal. C'est ce mouvement qui a permis, en France, la Révolution française. Même si la gauche, depuis le XIXème siècle, a largement fait de la question sociale son combat prioritaire, on ne peut oublier qu'elle aussi peut revendiquer avec fierté sa part des idées et des combats pour les libertés politiques.
Cela posé, le débat historique est intéressant, mais il ne permet pas d'éclairer, à mon avis, les enjeux actuels. S'il s'agit de dire nous sommes les héritiers des lumières et que, pour nous, l'émancipation individuelle des hommes et des femmes est aussi importante que la bataille pour leurs droits collectifs, oui, mille fois oui ! Faut-il pour autant se revendiquer libéraux ? Je ne le crois pas. Non pas, je viens de le dire, parce que ce serait inexact. Mais parce que ce terme, qui ne fait pas la synthèse de l'histoire de la gauche, s'est récemment imposé pour désigner la droite.
Sur ce point, je reconnais que le raccourci est largement erroné. Depuis René RÉMOND, nous savons que la droite est composite et que son courant libéral, qui court de la monarchie de Juillet à Valéry GISCARD d'ESTAING, n'a jamais été majoritaire. Le combat de Bertrand DELANOË, qui consiste à nier à la droite le monopole qu'elle entend s'arroger sur la défense des libertés, est à cet égard salutaire. Je crains cependant qu'il ne soit insuffisant. En France, ni la droite ni la gauche n'ont une histoire exclusivement libérale. Mais l'opinion, moins soucieuse d'Histoire que de combats présents, a tranché : pour elle, le libéralisme est devenu l'idéologie de la dérégulation économique. Les défis actuels, liés à la mondialisation, à la dislocation des solidarités collectives (territoriales et sociales), aux replis identitaires appellent de nouvelles réponses. Socialistes. Et émancipatrices.
Ce matin sur RTL nous avons eu le bonheur d'avoir madame Aubry avec ses projets ou plutôt la seule critique du pouvoir en place et sa ni ni déclaration comme candidate au poste de premier secrétaire, va-t-elle se montrer comme la digne représentante de son père ... je n'ai que de très bonnes idées mais je ne veux pas me lancer !!!
Rédigé par : Eilean | mercredi 28 mai 2008 à 09:02
Je viens de lire De l’audace, le livre de Bertrand Delanoë.
Comme déjà mentionné par beaucoup je trouve qu’il manque paradoxalement sérieusement de cette audace annoncée.
Les notions de justice plus que d’égalité, des références à une économie de marché nécessaire mais devant être réformée, celles qui accordent la plus haute importance à la formation et la recherche sont des bases sur lesquelles nombre de socialistes peuvent se retrouver.
Mais on y découvre aussi que la culture tout à fait sage et conventionnelle de Bertrand Delanoë est celle de quelqu’un qui abhorre l’extrême gauche, la rupture et ne fait pas preuve d’une audace débridée.
Le concept de libéralisme évoqué se rattache à des valeurs de rigueur de l’encadrement de celui-ci. Plus que de libéralisme, c’est en fait une forme de liberté à laquelle nous pouvons unanimement adhérer qui est ainsi revendiqué.
Il y a bien un coup de griffe à la synthèse molle pratiquée par un PS trop conservateur et des références au socialisme du 21ème siècle, mais pas de concept ni novateur, ni exceptionnel.
J’ai des points sur lesquels je diverge sérieusement. En particuliers, l’allègement des procédures de départ des entreprises. Egalement le fait de revendiquer que la gauche est le parti de l’impôt, et l’idée que ce dernier est l’outil exclusif de redistribution des richesses.
Enfin les références à la laïcité, aux relations avec les médias, à l’immigration, à l’écologie en fin d’ouvrage sont ponctuées de « il faut » bien consensuels.
Pour ma part, en sus de l’impôt nous devons susciter les talents et permettre à chacun de les exprimer. Si la redistribution peut réparer les inégalités, l’efficacité et la justice sont de donner aussi des possibilités équitables et justes à l’origine.
Nous devons aussi repenser le rôle des institutions qui ne protègent pas assez les individus.
Les difficultés liées aux particularismes géographiques, sociaux, générationnels ne sont pas assez prises en compte.
Nous devons repenser ainsi nos systèmes éducatifs, nos organisations d’entreprises, notre syndicalisme dont le périmètre d’actions devrait être à mon sens élargi,… beaucoup de travail et d’imagination à avoir.
Comme beaucoup j’appuierai des offres qui permettent de repenser plus collectivement, et plus largement et de manière plus innovatrice notre avenir.
Je ne vois pas aujourd’hui de solutions claires, pragmatiques, qui soient porteuses de cette espérance et de cet idéal.
Je pense que les perspectives que les socialistes sont en devoir de proposer aujourd’hui doivent se baser sur un nouvel humanisme.
Rédigé par : Jean-Louis | lundi 02 juin 2008 à 00:10