Je suis restée trop longtemps sans m’exprimer sur l’actualité. Je l’ai déjà dit, une actualité parlementaire chargée – cette semaine va commencer l’examen du texte sur l’hôpital, la santé, les patients et les territoires, baptisé projet HPST, sur lequel je travaille depuis des semaines déjà -, mais aussi des dossiers locaux prenants et…une mauvaise bronchite m’ont un peu détournée de ce blog. J’y reviens avec plaisir, en forme de retour sur une semaine marquée par des explications.
Explications de Bernard KOUCHNER, d’abord. Un livre le met en cause. Non pas sur le plan pénal, mais sur celui de la morale voire du conflit d’intérêts. Devant les députés puis à la télévision, le ministre des affaires étrangères s’est défendu, rappelant les engagements de sa vie, dénonçant à son tour le vocabulaire choisi de l’auteur du pamphlet à son encontre, qui est parfois celui des anti-sémites d’avant guerre. Je l’avoue, j’aime bien Bernard KOUCHNER. Je trouve qu’il a du panache. Il a aussi fait preuve de légèreté. Ses combats passés ont été grands, on aurait aimé qu’il ne trouvât pas inutile la création d’un secrétariat d’Etat aux droits de l’homme.
Kouchner a-t-il convaincu ? A vous de le dire. Pour ma part, j’aurais aimé qu’il s’expliquât davantage sur les conditions dans lesquelles il a aidé une société de conseil pour laquelle il avait travaillé - avant de devenir ministre et tout à fait légalement - à se faire payer par des Etats africains qui ne s’étaient pas encore acquittés de leurs honoraires. J’aurais préféré, je le dis très simplement, que le chantre de l’humanitaire ne fût pas à tu et à toi avec certains dictateurs peu recommandables. Mais je suis frappée de ce que la polémique ait pris un tour si passionnel, y compris à gauche. Comme si ce qui était reproché à Bernard KOUCHNER était bien autre chose que ce qu’il y a dans le livre de Pierre PEAN. Sans doute certains ne lui pardonnent-ils pas –et ils ont raison – d’avoir franchi le Rubicon pour participer à la politique de la droite. Je ne crois pourtant pas que ce soit le cœur du débat : certains trouvent enfin l’occasion de tirer un trait sur ce qu’il représente, une politique pas seulement réduite aux acquêts des intérêts des Etats, l’homme (trop) médiatique au service des victimes des guerres et des haines, celui qui a mis des mots, durs, sur les massacres du Rwanda. Alors, je l’avoue, tout cela me gêne. Peut-être parce que le plus souvent je me suis retrouvée du même côté que lui dans les combats qu’il menait. Pour tout ce qu’il a porté et incarné, Bernard KOUCHNER doit aller au bout de ses explications Pour que les adversaires de ses idéaux ne trouvent pas de prétexte pour l’abattre.
La semaine s’est poursuivie avec les explications de Nicolas SARKOZY. Très attendues, de fait, après la manifestation spectaculaire du 29 janvier. Que faut-il en retenir ? Une certaine sobriété dans le ton, un monologue plutôt ennuyeux que la servilité des journalistes n’a jamais fait dévier de son cours, à l’arrivée le sentiment d’un exercice un peu vain. Les Français ont-ils eu les explications qu’ils attendaient ? Je n’en suis pas certaine. A trop vouloir renvoyer la crise au reste du monde, le Président donne l’impression de ne pouvoir agir, de ne savoir comment peser. La vérité est que sa propre politique, incohérente, hésitant entre libéralisme dérégulateur et autoritarisme social, a renforcé la violence de la crise en France et n’indique aucun chemin pour en atténuer les effets. Comme si N. SARKOZY attendait que le plan OBAMA se mette à produire ses effets.
Quelles perspectives nous a-t-il proposées ? Je n’en vois pas. Les mesures esquissées étaient destinées à gagner du temps. Elles seront soumises à l’appréciation des syndicats, le 18 février : cela permettra de reporter la responsabilité de leur échec sur ceux-ci. Surtout, ces mesures sont à la limite de l’hypocrisie : après avoir expliqué que les socialistes étaient dans l’erreur à vouloir relancer le pouvoir d’achat, voilà le Président de la République à la recherche de pistes nouvelles en la matière ; ce fut la possible exonération d’impôt sur le revenu des Français concernés par la seule première tranche du barème. Assurément, cela représenterait pour eux un bonus. Mais au fond, est-ce souhaitable ? Je ne le crois pas. Car je pense que tous les Français devraient payer un impôt, même minime. A l’inverse, ce sont les salaires qui doivent être augmentés. A l’arrivée, l’Etat se déchargera une fois de plus sur les collectivités territoriales, qu’il asphyxie un peu plus encore en annonçant la fin de la taxe professionnelle (perçue par ces collectivités, précisément).
Quant aux belles phrases sur la refondation du capitalisme, elles sont définitivement reléguées dans les oubliettes de notre mémoire. Contraste saisissant avec les propos fermes tenus le même jour par Barack OBAMA. Là où le président américain propose de plafonner à 500 000 $ la rémunération des patrons des entreprises aidées par l’Etat, le Président français se tait, et préfère s’en prendre aux traders ! Il faut évidemment contrôler les rémunérations délirantes de ces hommes de bourse, mais enfin, cela ne règle en rien le problème de la rémunération des dirigeants, parfois indécente.
Comme souvent, le discours tenu aura tenu toutes les promesses du « deux poids deux mesures » : pas de revalorisation des salaires pour les ouvriers et les employés, pas de baisse des rémunérations pour les patrons !
Des explications, nous en attendons de Valérie
PECRESSE. La ministre de
l’enseignement supérieur a réussi à mettre le feu aux universités, mais du côté
des enseignants-chercheurs, cette fois, pas sur les bancs des étudiants. Tirant
très partialement les conséquences de sa loi sur l’autonomie, elle a fait du
Président de chaque université celui chargé de répartir la charge de travail,
entre enseignement et recherche, parmi les enseignants-chercheurs de son
établissement ; elle en a surtout fait le seul responsable des nominations
et promotions. C’est évidemment inacceptable ! Que les présidents
d’université aient davantage de pouvoir pour organiser et faire fonctionner
leurs établissements, d’accord ! Qu’ils aient tout pouvoir sur la carrière des enseignants-chercheurs,
non ! Et que l’on n’invoque pas l’exemple des plus prestigieuses
universités américaines : les choix y sont précisément collégiaux. De fait,
pour que la sérénité revienne, ce sont moins des explications que je demande,
que le retrait du « décret Pécresse ».
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