Le Parti socialiste s’est engagé dans la rénovation de ses procédures. Je m’étais personnellement engagée il y a plus d’un an pour que notre candidat(e) à la présidentielle fût désignée dans le cadre de primaires ouvertes. Ce sera le cas, à l’automne 2011. Les campagnes (très) longues ne sont pas les meilleures, et à ceux qui invoquent la nécessité que notre candidat(e) s’impose comme tel dans l’opinion, je réponds que ce sera nécessairement le cas : autant la candidature de Ségolène Royal a pu surprendre en 2006/2007, autant les Français se sont familiarisés au cours des années passées avec ceux qui paraissent susceptibles de porter nos couleurs dans cette compétition, qu’il s’agisse de DSK, de Martine Aubry ou encore de Ségolène Royal.
Les primaires en seront-elles vraiment ? Sitôt annoncées, elles suscitent des critiques, des doutes de la part de certains qui souhaiteraient s’y présenter ou d’autres qui n’aiment rien tant que l’odeur du sang. Les rumeurs d’un pacte liant les principaux candidats laissent à penser que les dés seraient pipés. Y a-t-il eu pacte ? J’en doute, en tout cas pas formel. En revanche, que les principaux responsables du PS se soient engagés, ou s’engagent, de fait, en disant l’avoir fait, à ne pas se livrer à une compétition fratricide, me paraît plutôt une bonne chose. Ce sont ceux qui hier reprochaient au PS ses divisions qui sont les plus féroces à critiquer sa cohésion. Quant à Daniel Cohn-Bendit, qui plaide pour l’affrontement, ouvert, n’y a-t-il pas quelque intérêt ? Les grands principes sont parfois inspirés par des considérations plus prosaïques. Quoi qu’il en soit, ces primaires seront ce que les candidats et les Français de gauche en feront.
Le cumul des mandats aura concentré toutes les attentions. Lors de mon grand oral, devant la presse tourangelle, j’avais dit que l’objectif de sa limitation n’était pas négociable puisque les militants l’avait souhaité par un vote sans ambiguïté. Ses modalités, en revanche, devaient être définies pragmatiquement. Il n’y a rien de pire, selon moi, que les grandes résolutions qui ne sont suivies d’aucun effet. Où aurait été la rénovation si les sénateurs, contraints de choisir entre leur mandat de parlementaire et la présidence d’un exécutif local avaient refusé de le faire ? Imagine-t-on la rue de Solférino s’engager dans une bataille interne avec ses élus à quelques mois de la présidentielle ? Evidemment non ! L’exemple de la bataille menée contre les soutiens de G. Frèche est probant : à quoi bon les grandes déclarations non suivies d’effet ? J’avais suggéré que le choix fût reporté pour tous, sénateurs et députés – entre lesquels il n’y aucune raison d’instaurer une différence de traitement- à l’été 2012. C’est ce qui a finalement été acté et je m’en réjouis : les socialistes font de la limitation stricte du cumul une exigence et un engagement qui s’inscrira dans les faits dans le sillage de la présidentielle.
La rénovation du siège du Parti socialiste à Paris est le signe de son nouvel état d’esprit. Pas de grands travaux, juste des portes ouvertes sur la rue au lieu d’être systématiquement closes ; quelques tables et chaises de couleur dans la cour, pour boire un café, discuter ou lire la presse en libre accès. C’est si peu, c’est si simple, mais ça change tout. De la couleur, de la gaîté, de l’ouverture. Belle réussite, due à Martine Aubry.
Quand je vois les contorsions de Christine Boutin, je me dis
que la rénovation n’est pas franchement la chose la mieux partagée au monde.
Tout a été dit sur l’indécence de sa situation financière, je n’y reviens pas.
Pour moi, la réalité est ailleurs : des missions rémunérées, il y en a eu
d’autres ; des missionnés qui bénéficient, pour accomplir leur travail, de
locaux et de quatre collaborateurs eux-mêmes très correctement rémunérés, je
n’en vois pas d’autre. La réalité me paraît transparente : Christine
Boutin se fait financer par l’Elysée son mouvement politique, qui saura le jour
venu renvoyer l’ascenseur. Ce n’est pas la peine de multiplier les
protestations d’indépendance, les faits parlent d’eux-mêmes.
J’ai entendu Daniel Cohen, professeur d’économie à l’Ecole
Normale Supérieure, à la radio,
expliquer il y a quelques jours la gravité de la situation actuelle. La sortie
de crise, selon lui, paraît compromise et le retour de l’emploi, espéré pour
2011, n’arriverait pas avant 2012, dans le meilleur des cas. Ce n’est qu’un
avis, Daniel Cohen n’est pas cependant le plus mauvais de nos économistes. Son
inquiétude inquiète et oblige à la prudence. Mais la rigueur qui s’installe est
un remède dangereux : la France a gaspillé ses richesses à un moment où
elle aurait dû être rigoureuse dans sa gestion. Elle n’a plus les moyens de la
relance vigoureuse qui serait nécessaire. Mais ce n’est pas en étranglant les
salariés, en limitant le pouvoir d’achat des consommateurs que le gouvernement
fait preuve de responsabilité. Serrer la ceinture n’a jamais tenu lieu de
politique, surtout dans un pays confronté à des inégalités croissantes. Etre
rigoureux, oui ; mais cela implique de faire preuve de discernement dans
les politiques publiques, pas d’imposer des coupes sombres uniformément, sans
se préoccuper de leurs effets. Faire des choix, oui ; mais pas
systématiquement au mépris des besoins sociaux et de l’investissement dans
l’éducation et la recherche nécessaire au développement de notre économie.
Je recommande la lecture du dernier roman de Luis Sepulveda, L’ombre de ce que nous avons été (publié aux éditions Métailié en 2009). Ecrivain chilien exilé en Europe à la suite du coup d’Etat de Pinochet, parmi les plus célèbres de langue espagnole, il raconte avec humour et drôlerie l’histoire triste, si triste, de cette génération qui, malgré le retour de la démocratie, reste exilée à elle-même. Ces militants de la liberté se sentent déphasés dans un pays qui se construit en oubliant cette histoire pourtant récente, exilés ils rêvaient de rentrer, rentrés ils ne retrouvent plus leurs racines. On ne revient jamais complètement de l’exil.
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