Mes amis, je suis venu […] vous dire quelques petites choses simples, trois petites phrases. Trois petites phrases qui pour moi doivent résumer notre conviction et notre engagement dans les jours qui sont devant nous.
La première, c’est que nous devons gagner.
La seconde, c’est que nous pouvons gagner.
La troisième, c’est que nous allons gagner ! Oui, nous devons gagner.
Nous devons gagner, pas pour nous-mêmes, même si dans cette salle, j’en suis sûr, il y a des hommes et des femmes qui souffrent de salaires trop faibles, de risque de chômage, ou peut-être de chômage déjà durable, de retraites qui ne permettent pas de boucler les fins de mois, mais nous devons gagner pour les autres, car même ceux qui souffrent dans cette salle, parce qu’ils sont de gauche, ils savent qu’ils se battent pour les autres, pour ceux qui souffrent encore plus. Nous devons gagner.
Nous devons gagner pour tous ceux qui sont opprimés dans leur travail, tous ceux qui cherchent un emploi, qu’ils aient 20 ans ou 50 ans et qui n’arrivent pas à entrer sur le marché du travail, pour tous ceux que nous rencontrons tous les jours, vous comme moi, et qui nous disent : « Il faut que ça change, ça ne peut plus durer. » Pour eux, parce qu’ils en ont besoin, nous devons gagner.
Nous voulons de la volonté politique, pas du renoncement, comme Nicolas Sarkozy face aux banlieues par exemple, où il se contente bien de laisser ceux qui sont dans les cités et qui y restent, à condition de mettre un cordon de police autour et d’empêcher qu’ils viennent salir les beaux quartiers.
Oui, pour ceux qui sont dans les cités, nous devons gagner.
Nous voulons de la compétence et pas de la fumée, comme quand Nicolas Sarkozy nous dit qu’il va combler le trou de l’assurance maladie par une franchise. Injuste ! Insupportable quand il la fixe à 10 euros par personne ! Mais quand on compte, 10 euros par personne, 60 millions de Français, c’est 600 millions, il en faut 6 milliards pour le trou, ce n’est pas 10 euros la franchise de M. Sarkozy, ce sont 100 euros, il faut la combattre dix fois plus fort. Pour tous ceux qui sont malades, pour les patients qui ont besoin de solidarité, nous devons gagner.
Nous voulons des valeurs de solidarité, pas d’individualisme, comme quand Nicolas Sarkozy nous dit : « Mais il faut pouvoir travailler plus si on veut gagner plus ! » Et qui prévoit de libérer les heures supplémentaires pour qu’elles soient plus faciles. Alors que se passera-t-il quand une entreprise aura de l’emploi à fournir ? Elle le fournira à ceux qui sont dedans, et jamais à ceux qui sont dehors. Plus jamais un chômeur ne sera employé !
Pour ceux qui cherchent un emploi, nous devons gagner !
Dans la société de Nicolas Sarkozy, il y aura des gagnants, mais il y aura surtout des perdants. Sa société, c’est la société des gagnants-perdants, ce que Ségolène Royal nous propose, c’est la société des gagnants-gagnants.
Mais nous devons gagner pas seulement pour ceux qui souffrent, nous devons gagner aussi pour l’Europe, comme Romano Prodi vient de nous le dire, comme d’autres, partout en Europe autour de nous, nous le diraient. Les Européens, qu’ils soient de droite ou de gauche, regardent aujourd’hui la France, ils savent que c’est de France que doit venir l’impulsion. Ils savent que ceci conduira à régler quelques problèmes du jour, le mini-traité, mais que c’est renoncer à l’ambition de la construction européenne.
Nous, nous voulons que ce ne soit pas simplement dans les proclamations, mais dans les engagements et dans les décisions que l’Europe parte de l’avant.
La présidence française, ça ne peut pas être la fille peu légitime de Rastaquouère et du petit **, la présidence française, ça doit être une grande présidence. Les Européens nous regardent, ils nous attendent, et pour eux, nous devons gagner.
Pour cette Europe, cette Europe que nous avons construite, nous Français, avec d’autres, mais beaucoup nous Français, et qui porte la trace de la France, la trace de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, la trace des droits de l’homme, cette trace qui vient de la Révolution française, et qu’au travers de deux siècles d’histoire, tous ceux qui se sont battus à gauche, tous les démocrates ont fait fructifier dans notre pays, et que, par touches parfois insaisissables, nous avons su faire rentrer dans l’Europe.
[…]
Oui, nous devons gagner.
Alors, me direz-vous, est-ce que nous pouvons gagner ?
Oui, nous pouvons gagner, le premier tour l’a montré. Il a montré comment la gauche s’était déjà largement rassemblée sur le nom de Ségolène Royal. Il a montré comment, au soir du premier tour, tous ceux, et c’est bien légitime, qui avaient pu préférer à gauche un autre candidat ont appelé à voter pour Ségolène Royal.
Ce premier tour, il a montré que notre peuple, celui dont on disait qu’il ne s’intéressait plus à la politique, qu’il était découragé par l’action politique, était capable de se mobiliser et venir à plus de 80 % voter pour l’élection présidentielle.
Oui, la mobilisation est là, et c’est pour ça que nous pouvons gagner.
Nous pouvons gagner aussi parce que les quelques jours qui se sont écoulés depuis dimanche ont montré à tous les Français ce que serait la présidence de Nicolas Sarkozy : l’anathème lancé sur tous les autres, le débauchage des parlementaires centristes, les menaces contre les médias qui auraient osé organiser le débat réclamé, jusqu’au syndicat de journalistes qui, dans une dépêche tout à l’heure, s’est levé contre cette atteinte à la démocratie, un Sarkozy pas encore président, c’est déjà un danger ; un Sarkozy président, ce sont les libertés en cause !
Nous avons vécu, vous avez vécu, il y a un an de cela, des manifestations autour du CPE.
Nous avons vu comment, lorsqu’un homme de droite est convaincu de l’action libérale, de sa justesse, il est capable d’avancer vers le mur, de mettre les Français dans la rue.
Demain, si la droite devait être élue, ce n’est pas un CPE sur l’emploi des jeunes, ce sont cinq, dix CPE, sur la santé, sur le droit de grève, sur les retraites, sur le droit du travail... C’est la France en conflit !
Les Français ne veulent pas de cela, ils veulent une France rassemblée, ils ne veulent pas une France du conflit, et pour cela, nous pouvons gagner.
Ce que propose Ségolène Royal, c’est une société démocratique, une société ouverte. Ce que nous propose Nicolas Sarkozy, c’est la société du libéralisme et la société du corset. Et les Français ne veulent pas cela.
Alors, mes amis, nous allons gagner !
Nous allons gagner parce que, dans les jours qui viennent, Ségolène Royal saura rassembler autour d’elle.
C’est moi, moi qui, vous le savez, ai été candidat contre elle qui vous le dis.
On ne peut pas demander une procédure démocratique dans son parti et ensuite ne pas se plier au vote des militants, et donc je la soutiens de toute ma force.
Aujourd’hui en France, quand on est de gauche, quand on est démocrate, on vote pour Ségolène Royal.
On ne cherche pas des faux-fuyants, des mauvaises raisons, des arguments techniques. On dit : je suis de gauche. On dit : je suis un démocrate. On dit : le choix nous engage pour cinq ans, pour dix ans peut-être.
On dit : je vote pour Ségolène Royal.
Mes amis, vous êtes les fils et les filles du progrès.
Vous êtes les héritiers d’un combat centenaire, d’un combat dans les corons pour l’égalité, d’un combat dans la rue pour les libertés. Il nous faut maintenant, dans ce combat historique, puiser la force pour gagner. Il faut que ceux qui nous ont précédés nous apportent leurs ressources. Toi, Jean Jaurès, il faut que tu nous donnes ta profondeur. Toi, Léon Blum, il faut que tu nous donnes ton courage. Toi, François Mitterrand, il faut que tu nous donnes ta vision.
Oui, devant vous, ce soir, j’invoque leurs noms : toi Jean, toi Léon, toi François, pour Ségolène !
Mes amis, il est temps que la gauche se lève, il est temps que nous commencions à marcher, sans cesse, sans faiblir, jusqu’au 6 mai, pour que, pour la première fois dans notre pays, une femme soit élue présidente de la République.
Il faut maintenant que vous vous leviez pour le progrès, pour la République et pour la France.
Ségolène, nous t’attendons.
Dominique Strauss-Kahn
Député du Val-d'Oise. Adjoint au Maire de Sarcelles. Président de la communauté d'agglomération Val de France.
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