Rien ne justifie que nous soutenions aujourd'hui un projet que la discussion au Sénat n'a pas modifié sur le fond. Au contraire, le climat de tension sociale qui règne dans le pays ces jours-ci montre l'ampleur des inquiétudes. La vérité est qu'en six mois de gouvernement, votre majorité n'aura su qu'attiser les craintes, renforcer la peur de l'avenir, ignorer les demandes venues des catégories populaires ou des couches moyennes. Ce PLFSS est à cet égard emblématique : votre politique s'est révélée incapable depuis 2002 d'enrayer la dégradation des comptes sociaux, mais la seule responsabilité que vous sachiez mettre en cause est celle des patients eux-mêmes, en instaurant le système des franchises ; votre gouvernement a choisi de dilapider d'emblée toutes ses réserves budgétaires en octroyant de coûteux cadeaux fiscaux aux Français les plus riches, mais refuse de s'engager immédiatement sur une augmentation des retraites qui soit supérieure à l'inflation. Nous sommes aujourd’hui confrontés à une crise financière majeure de notre système de protection sociale, qui traduit l’échec de votre politique depuis 2002. Nous attendions des mesures fortes de rétablissement des comptes, parce que sans responsabilité financière il ne peut y avoir de réponse aux nouveaux besoins sociaux. Or, ce PLFSS ne contient pas même l'amorce d'une refondation ; il entérine les échecs passés et se donne le luxe de poursuivre dans la même voie. La restriction et le rationnement ne peuvent tenir lieu de principe d'action : l'échec de cette politique est certain.
Trois raisons principales nous amènent à ne pas voter votre texte.
La première concerne les franchises, qui ne sont rien d'autre qu'une taxe sur les malades. Nous avons dit notre opposition à un mécanisme qui contrecarre les fondements mêmes de notre protection sociale. La preuve en est que vous avez vous même évolué sur la manière de les présenter : il s'agissait d'abord de faire face au déficit de la sécu, ensuite de financer de nouveaux besoins – la maladie d'Alzheimer par ex. -, et dans tous les cas de mieux responsabiliser le patient ! Ce discours n'a aucune crédibilité : des franchises, vous en avez instaurées plusieurs à l'occasion de la réforme de 2004. Elles étaient censées transformer les comportements des patients, on a vu la suite ! Le seul résultat de votre politique sera d'instaurer une médecine à deux vitesses : 15 % des Français déjà renoncent à se soigner pour des raisons financières ; demain, ils seront davantage encore, sans compter que ces franchises se traduisent d'emblée par une augmentation des assurances complémentaires de 4 % en moyenne. Quant à l'idée d'une responsabilisation des malades atteints de cancers, de diabète, ou de la maladie de Parkinson, elle est au mieux risible, plus sûrement honteuse !
Les franchises sont une mauvaise idée parce qu'elles pénalisent les Français aux revenus modestes ou moyens. Elles sont une mauvaise idée parce qu'elles ne sont pas susceptibles de modifier les comportements, on l'a vu depuis 2004. Elles sont une mauvaise idée enfin parce qu'elles introduisent l'idée d'une faute, là où les malades sont confrontés à un risque, parfois à une épreuve.
La deuxième raison de fond pour laquelle nous ne pouvons voter ce texte concerne votre politique des retraites. Les socialistes estiment qu'il est urgent de garantir durablement les retraites. Les mouvements sociaux actuels et, au-delà, l'inquiétude exprimée par les Français sur leurs retraites futures montre qu'il y a un risque majeur que les jeunes actifs d'aujourd'hui, par défiance, se détournent du système de répartition.
Je l'ai déjà exprimé à cette tribune à de nombreuses reprises, je le répète :
la réforme des régimes de retraite est nécessaire à la garantie durable du versement des pensions.
Cette réforme repose depuis 2003 sur l'allongement de la durée de cotisation; c'est un principe qui a sa légitimité dès lors qu'augmente l'espérance de vie.
Mais cet allongement de la durée de cotisation n'est supportable qu'à trois conditions : d'abord, que l'effort soit modulé pour tenir compte de la pénibilité des métiers ; ensuite, que l'allongement permette de garantir effectivement le niveau des pensions ; enfin, qu'il rétablisse une confiance durable dans nos régimes de retraite.
Or, ces conditions à ce stade ne sont pas remplies. La pénibilité du travail n'est pas prise en compte, alors que le sujet est sur la table depuis 2003. Le niveau des pensions n'est pas garanti, du fait d'abord de l'empilement des dispositifs qui en diminuent le montant : période de référence pour le calcul des retraites, mode d'indexation; mécanisme de la décote...du fait ensuite de ce que les actifs d'aujourd'hui n'ont aucune certitude de pouvoir travailler au-delà de 55 ans : votre projet de loi à ce titre n'est pas à la hauteur du défi que représente pour notre pays l'emploi des « séniors ». Je regrette que le Président About ait retiré au stade de la CMP son amendement, voté par le Sénat, qui pénalisait les entreprises de plus de 250 salariés n'employant pas suffisamment de séniors : nous l'aurions voté, car il faut mettre en place des dispositifs plus directement contraignants à l'égard des entreprises récalcitrantes. Quant aux actuels retraités, votre loi prévoit une augmentation de leurs pensions de 1,1 % seulement pour l'année prochaine, ce qui est d'ores et déjà inférieur à l'inflation : vous avouerez que pour un gouvernement qui prétend s'occuper du pouvoir d'achat des Français, on peut faire mieux !
Enfin, le versement des retraites n'est pas garanti dans la durée, alors que l'on sait que nous serons confrontés à un pic de paiements entre 2020 et 2040, particulièrement entre 2020 et 2030. Seul le fonds de réserve des retraites, mis en place par le gouvernement de L. Jospin, peut permettre d'y parvenir : or, vous refusez de l'alimenter de manière conséquente, ce qui rend son utilité future très aléatoire.
J'en viens dès lors à la troisième raison de fond pour laquelle nous ne pouvons voter votre texte: l'absence de ressources nouvelles pour consolider notre protection sociale, et alimenter le fonds de réserve des retraites. Nous avons fait des propositions concrètes dans le cours du débat : ce ne sont pas les salariés, les patients qui doivent être mis à contribution, mais ceux qui bénéficient de niches fiscales attrayantes. Nous proposons très concrètement l'instauration d'une taxe de 8, 70 % sur les plus values réalisées sur les stocks options, dont le produit sera versé au FRR. C'est une question de justice, d'équité comme vous aimez tant à le dire. Le sénat et la CMP dans son sillage ont cru bon d'alléger encore le dispositif pourtant bien léger voté par votre majorité à l'Assemblée. A la demande pressante du gouvernement, semble-t-il. Là encore, comment donner crédit à vos belles paroles sur la justice dès lors que votre seule préoccupation concerne les privilèges fiscaux des plus riches !
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, et bien d'autres évoquées lors du débat de votre projet et qui auraient pu être rappelées aujourd'hui, nous ne voterons pas votre texte.
Téléchargement : Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008
2007 Monsieur Sarkosy 21 038 891 voies
Madame Royal 20 712 043 voies
2002 Monsieur Chirac 85 % des voies
Monsieur Le Pen 15 % des voies
Monsieur Jospin éliminé dès le premier tour !!!
Mais pourquoi les français sont si ingrats envers vos idées d'un autre âge et vos positions à 99,99 % contre !!! MEDITEZ Madame le Député.
Rédigé par : Eilean | jeudi 22 nov 2007 à 14:52
Je vous soutiens d'un bout à l'autre de votre intervention sur le PLFSSS. Les idées sont claires, les arguments indéniables, et seule la mauvaises foi partisane d'Eilean (qui développe par ailleurs des arguments tout à fait insipides...) peut trouver des choses à redire.
Continuez le combat, c'est avec des élues comme vous que la gauche retrouvera son souffle !
Rédigé par : Vincent | dimanche 25 nov 2007 à 12:09
Vous prenez une route difficile mon cher Vincent, il y a des élus de gauche qui marchent les yeux grands ouverts je pense à Manuel Valls par exemple ... malheureusement ils ne sont pas asser nombreux !!!
Rédigé par : Eilean | dimanche 25 nov 2007 à 21:16
La France change d'époque. D'abord à cause de l'allongement de la durée de vie et de l'alourdissement des coûts de la santé. Ce n'est pas faute d'avoir baissé le prix des médicaments. Il faut bien maintenant se dire que le modèle social français est à bout, et que nous aurons tous des efforts à faire.
Rédigé par : Dominique MOREL | lundi 26 nov 2007 à 20:08