Monsieur le Président de la commission d'enquête,
Le projet de Ligne à Grande Vitesse Sud Europe Atlantique (LGV-SEA),
qui traversera notre département, fait actuellement l'objet d'une enquête
publique. Comme la très grande majorité des populations, des associations et
des élus concernés, je ne remets pas en cause son utilité au regard de l'intérêt
général, alors même que son intérêt particulier pour notre département est
inexistant. Cependant, sa construction, dans des zones pour certaines fortement
urbanisées, ne saurait se faire sans tenir compte de leurs habitants. Il paraît
par ailleurs équitable que des compensations soient apportées, en faveur du
développement local.
Lors d'une réunion présidée par le préfet, qui s'est tenue à la
préfecture de l'Indre-et-Loire le 16 juillet dernier, j'ai, avec d'autres,
exprimé mon insatisfaction face à l'avant projet sommaire. Il m'a été répondu
que des améliorations pourraient être apportées à cet avant projet à l'occasion
de sa mise à l'enquête publique. Je
souhaite donc vous faire part de mes observations sur le projet soumis à
consultation. J'adresse par ailleurs un courrier dans le même sens au préfet de
l'Indre-et-Loire.
Je tiens en premier lieu à exprimer de fortes préoccupations et
formuler des demandes pour l'ensemble du tracé de la future ligne.
Comme je l'ai souligné, l'intérêt direct de ce
projet pour notre département est mineur. La création d'un fonds de solidarité territoriale permettrait donc de
compenser les contraintes subies par les communes traversées par la nouvelle
ligne. A ce titre, il est indispensable que l'Etat et RFF s'engagent à
compenser le préjudice subi et apportent leur contribution au développement
local du territoire traversé par la LGV. Cette contribution passe bien
évidement par une compensation financière des dégradations occasionnées, mais
aussi par un engagement fort de la SNCF pour l'amélioration des dessertes
locales. Cela implique, pour la ligne Tours-Loches, la réalisation sans délai
par RFF de la commande centralisée de Cormery, et pour la ligne Tours-Port de
Pile, la réalisation au sud de Tours des travaux nécessaires à l'augmentation
du trafic TER.
Les mesures de protection sonore proposées sont très insuffisantes au regard de la gêne réelle
occasionnée par le passage de la nouvelle ligne dans une zone déjà fortement
urbanisée. La prise en compte pour réaliser les équipements de protection de
l'indicateur de bruit moyenné, exprimé en LAeq ( moyenne des pics sonores et
des périodes de silence sur une plage horaire), minore considérablement la gêne
réelle provoquée spécifiquement par la nouvelle infrastructure. Seule la prise
en compte du bruit en LAmax (mesure du bruit au moment de l'événement)
permettra de prendre en compte la gêne effective au passage des trains et donc
de réaliser des équipements de protection adaptés.
Pour apprécier cette gêne sonore, il est
également indispensable de tenir compte des infrastructures déjà existantes
(A85 – A10 – ligne TGV actuelle) et de raisonner à partir du niveau sonore
cumulé, c'est-à-dire généré par l'ensemble des infrastructures juxtaposées.
Dans ce cas, il est très probable que le niveau sonore cumulé, notamment à
Veigné (A 85 - LGV), dépasse le seuil de 60 dB[1].
La ligne actuelle doit faire l'objet
d'aménagements phoniques spécifiques. En effet, la création de la nouvelle ligne
provoquera une évolution importante de l'utilisation de la ligne actuelle:
poursuite du trafic TGV, accroissement du trafic TER et développement du FRET
ferroviaire. Des aménagements d'isolation phonique de l'ancienne ligne doivent
être pris en compte dans le projet de la LGV-SEA , notamment à Monts et
Villeperdue, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Des mesures d'insertion paysagère doivent
permettre au Val de l'Indre, dont le cadre de vie est un des atouts majeurs de
préserver la qualité de ses paysages, appréciés par les habitants et indispensables
au maintien et au développement de l'activité touristique. Dans ce cadre, il
est indispensable de rechercher la plus grande continuité paysagère tout au
long de la nouvelle voie, en privilégiant la
réalisation de tranchées ou de déblais profonds et des mesures d’accompagnement
telles que création de haies, de murs, de merlons.
Les acquisitions foncières nécessaires à la
réalisation de la nouvelle ligne doivent être faites par anticipation
lorsqu'elles concernent des lieux d'habitation ou d'activité afin de permettre
à leurs propriétaires de disposer des moyens et du temps nécessaires pour se
reloger ou transférer leurs activités.
Le rétablissement des circulations sur les axes
traversés par la LGV-SEA devront se faire dans le plus strict respect des
usages existants (circulation automobile, mais aussi chemins de randonnées pour
piétons, cyclistes, cavaliers). Dans tous les cas, il ne serait pas acceptable
que le rétablissement des circulations aboutisse à un rallongement des
distances parcourues par les habitants, ni à la création de nouvelles nuisances
résultant de la création de nouvelles voies routières. L'entretien des
nouvelles voies et des ouvrages d'art réalisés pour le franchissement de la
LGV-SEA ne devra pas incomber aux communes concernées.
Au delà de ces exigences générales sur les
mesures d'accompagnement de la réalisation de la LGV-SEA, je souhaite appuyer
les avis formulés par les conseils municipaux des communes traversées par la
LGV.
Pour la commune de Chambray-lès-Tours, l'ensemble du tracé de la LGV doit être
réalisé en déblai profond. Les relevés topographiques attestent de la
possibilité technique de cette variante. Elle permettrait de limiter
considérablement les nuisances sonores et visuelles ainsi que de rétablir les
circulations au niveau naturel du terrain. Lors de la réunion publique qui
s'est tenue le 5 décembre 2007 à Chambray-lès-Tours, les représentants de RFF
ont confirmé la possibilité technique de cette variante, précisant que seules
les incidences financières induites les avaient amenés à exclure cette
proposition du document de consultation. Cet argument paraît inconvenant
au-regard des conditions de vie durables de la population de ce secteur de
l'agglomération.
La commune de Veigné est
déjà fortement stigmatisée par les infrastructures : passage de l'A10 sur 3,2 km, passage de l'A85 sur 6 km,
présence de l'échangeur A85/A10 sur une emprise de 100 hectares. Le choix du
projet en discussion qui prévoit la traversée des Gués en déblai profond et
contigu à celui de l'A 85 génèrera des nuisances lourdes pour l'environnement. Cette solution est par
ailleurs totalement incompatible avec le projet urbain de la commune de VEIGNE
(ZAC des Gués). La seule solution acceptable est le passage de la LGV-SEA aux
Gués de Veigné en tranchée couverte depuis le franchissement du VC 11 et de l'A
85 et jusqu'au franchissement de la voie ferrée Tours-Chateauroux.
Sur la suite du tracé (Thorigny-Beaupré), une douzaine d'habitations
sont situées dans la bande des 250 mètres dont 5 seront détruites. Plusieurs
monuments historiques ou établissements touristiques sont concernés : domaine
patrimonial de Thorigny (maison du XVIème avec gîte d'accueil et château de
1846) , manoir de Beaupré (monument historique inscrit du XVIIème) et l'hôtel
restaurant 3 étoiles du Moulin Fleuri. Compte tenu du caractère historique et
touristique de ce secteur, il est indispensable de prévoir un rétablissement
des circulations sans création de voies nouvelles ainsi que l'abaissement du
profil en long et le renforcement des mesures de limitation des nuisances
sonores, notamment sur le viaduc réalisé pour la traversée de l'Indre. La
plupart des solutions d'aménagement proposées tiennent compte d'un emplacement
réservé pour un éventuel aménagement du contournement autoroutier de Tours.
Cette hypothèse, dont l'intérêt général
n'est pas aujourd'hui avéré, ne doit pas imposer des contraintes
supplémentaires pour l'aménagement de la LGV.
Pour la commune de Monts, l'abaissement du profil en long de la LGV-SEA au niveau du parc de
loisirs de la Récréation permettrait de diminuer les nuisances visuelles et
sonores à proximité d'un site d'activités de loisirs important. La modification
du trafic sur la ligne actuelle doit être anticipée et la réalisation de murs antibruit
au niveau de la Lande, de Bois Joli, de la Récré, de la Liborie et la
Tardivière doivent être intégrée au projet.
Pour la commune de Sorigny, la réalisation de murs antibruit au niveau du lieu dit « les
Ruaux » apparaît indispensable. Il me semble également souhaitable
d'étudier la possibilité de déplacer plus au sud la voie de raccordement avec
la ligne actuelle, mais en-deçà du péage, sur la traversée du domaine de Longue
Plaine : ce déplacement, qui ne touche pas de nouveaux propriétaires, permettrait
de mieux prendre en compte la réalité historique et économique de ce domaine.
La commune de Villeperdue est aujourd'hui traversée en son centre par la ligne actuelle. Elle
sera demain fortement touchée par la modification du trafic il est donc particulièrement
indispensable de prévoir des mesures de protection sonore et de porter une
extrême attention aux mesures visant à améliorer l'insertion paysagère des deux
infrastructures. Des protections efficaces devront être mises en place au droit
du hameau «le Bry», «la Laurière», «la Forêt» et «le Sablonné». En ce qui
concerne le centre de karting, le maître d'ouvrage devra prendre en charge la
mise à disposition de nouveaux terrains ainsi que les travaux d'équipement
nécessaires à la poursuite de l'activité.
Pour les communes de Sepmes et de Draché, la passage de la LGV-SEA nécessite la
construction d'un viaduc pour traverser la vallée des Coteaux. La qualité
naturelle de ce site exceptionnel implique que le viaduc construit soit de très
grande qualité architecturale, que les isolations phoniques soient maximales et
que des mesures fortes de protection et de valorisation de la flore soient
prises en son centre par la ligne actuelle. Ce n'est pas le cas du projet
actuel.
Enfin, la situation particulière de la commune de Maillé, au-regard notamment de son histoire,
impose de faire preuve de respect et d'attention dans le traitement de ce
projet. Des aménagements spécifiques sont à réaliser. Je soutiens les demandes
faites en ce sens par le conseil municipal de maillé, notamment de son
opposition à la création d'une voie de raccordement sur la ligne existante.
Je souhaite qu'à l'issue de cette phase d'enquête publique, les nombreux avis formulés par les habitants et les élus des territoires traversés par la LGV-SEA soient pris en compte. Je suis pour ma part déterminée à défendre un encadrement plus strict des nuisances sonores occasionnées par cette nouvelle ligne. J'interviendrai personnellement auprès du ministre chargé des transports pour demander que des normes plus favorables à la protection des habitants soient établies et appliquées lors de la réalisation de la LGV-SEA.
Je vous prie, Monsieur le Président de la commission d'enquête, d'agréer l'expression de ma sincère considération.
[1] Le seuil de 60 Db, fixé règlementairement, doit par ailleurs être abaissé. Cette décision relevant du ministre chargé des transports, j'adresse par ailleurs une demande en ce sens à Monsieur Dominique BUSSEREAU.
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