A en croire la presse, la gauche aurait manqué son rendez-vous sur la remise en cause du temps de travail. J'avoue ma perplexité...et mon agacement à la lecture de ces articles. Car les députés de gauche étaient bien présents, de nuit comme de jour, pour empêcher le travail de sape du Gouvernement. Le débat a commencé mardi 8 juillet, dans la relative indifférence médiatique, s'est poursuivi dans la tourmente déchaînée par la libération d'Ingrid Bétancourt, pour s'achever dans la nuit de lundi à mardi avec la remise en cause, par la droite, du temps de travail des cadres. La presse, si nombreuse pour suivre l'élection du président du groupe socialiste -ah ! la belle bataille....- n'a pas davantage brillé par son intérêt pour nos débats.
Mais à bien lire les reproches qui nous sont adressés, que lit-on ? Que le Premier secrétaire n'était pas à la manifestation des syndicats ; que les ténors étaient peu nombreux dans l'hémicycle. Au fond, la politique aurait besoin de grandes épopées, pas du travail de fond des parlementaires ! J'ai souvent dit combien la tâche des socialistes, dans les prochains mois, était décisive : non seulement se battre contre le Gouvernement et proposer une autre voie mais donner une cohérence à l'ensemble de nos actions. Je n'ai jamais caché que le travail des députés me paraissait souvent isolé ; il n'est pas pour autant inexistant.
Alors, oui, la bataille sur le temps de travail a été perdue. Pour le moment. Dans les urnes, puisque l'opposition ne devient pas, d'un coup d'un seul, majoritaire dans l'hémicycle. Dans l'opinion, sans doute, peu mobilisée avec des syndicats eux-mêmes en retrait. Dans la pédagogie, puisque les Français ont compris qu'il s'agissait de donner de la souplesse à la rigidité des 35 heures avant de comprendre -les cadres l'ont fait subitement !- qu'il s'agissait de faire sauter les verrous d'une limitation du temps de travail, quelle qu'en soit la durée.
Que faut-il en déduire ? Qu'il nous faut davantage de cohérence entre tous les lieux d'expression socialiste. Que pour être audible sur un projet, il nous faut être crédible sur tous. L'enjeu du Congrès de Reims est bien là. Mais pas de fausse querelle : les socialistes, à l'Assemblée, se sont battus contre la remise en cause de la durée du temps de travail. Et ce combat, il ne fait que commencer...
Plus que tout autre le débat sur le temps de travail et les 35h, et celui qui lui est lié concernant le pouvoir d’achat met en évidence le clivage droite/gauche.
Le « travailler plus pour gagner plus », dont les français voient pour leurs malheurs ce qu’il en est advenu, a été en parti responsable de la défaite à l’élection présidentielle puis aux législatives. Mais ce n’est, et ne sera jamais une réponse adéquate, même partielle, à la stagnation puis à la récession actuelle ressentie d’autant plus durement encore par les plus défavorisés.
On oubli un peu vite que c’est la droite qui avec la loi Robien a été à l’initiative de l'annualisation et de la réduction du temps de travail. On oubli également que les grandes entreprises s’arrangent très bien, au point de ne plus pouvoir sans difficultés s’en passer, des accords signés.
Un temps discret sur le sujet ; débat parlementaire, puis sondages montrant l’attachement des français aux 35h, et enfin mise sur le devant de la scène de Mme Aubry aidant, la gauche et le PS remontent au créneau.
Il faut ajouter que le manque de dialogue et la traitrise de Mr Sarkozy, (car c’est bien lui le seul coupable), vis-à-vis des organisations syndicales est un élément qui le justifierait à lui seul.
De plus la crise sociale aggravée permet de mettre en place des jalons à une stratégie de reconquête si nécessaire.
Cependant ce que j’ai expérimenté de la mise en place des 35h a été une remise en cause parfois vraiment difficile, mais aussi parfois salutaire des organisations.
Il en a résulté dans certains cas une meilleure productivité et un mieux vivre pour tous.
Dans d’autres, malheureusement, j’ai observé un déséquilibre de la charge de travail qui s’est reporté sur les cadres des entreprises. Elle a accentué la pression exercée par une direction avide, et exigeante de résultats mais aveugle sur les manques de moyens générés pour y parvenir. Il est pour moi édifiant que ce soit justement les cadres qui sont aujourd’hui visés par la loi en augmentant leurs forfaits annuel jour à 235.
La mise en place de cette réduction du temps de travail, a été aussi à l’origine de mise en place d’organisations faisant appel largement au travail à temps partiel ou précaire.
La situation de clivage que nous connaissons aujourd’hui, provient à mon avis d’un manque de concertation au moment de la mise en place. Et nous devrions tirer leçon de cette expérience pour que de notre coté également, plus jamais aucune mise en place ne sa fasse sans dialogues extrêmement approfondis avec toutes les parties, permettant d’établir un consensus.
Mais une des conséquences pour moi la plus négative résultant de cette situation a été d’accentuer le fossé entre les rémunérations des employés ouvriers et celles des cadres.
Cette situation est d’autant plus critique pour ces derniers en période de stagnation, de récession où « gagner des sous » devient non pas un objectif de mieux vivre mais bien de survie. Nous sommes dans une situation sociale bien fragile, et je pense que nos dirigeants actuels sont bien aveugles de ne pas y prendre garde.
La valeur travail est aujourd’hui galvaudée, mais c’est une richesse qui doit être partagée et faire l’objet d’une meilleure répartition entre tous et au-delà de l’application stricte des 35h.
Je pense donc qu’elle doit être reconsidérée, que la gauche doit se la ré approprier et qu’elle a toute légitimité à le faire
Si nous savons dépasser tout dogmatisme je pense que c’est elle qui avec l’égalité des chances en matière d’éducation permettront d’élaborer une justice sociale efficace et de gauche.
Rédigé par : Jean-Louis | lundi 14 juil 2008 à 20:21