Marisol Touraine, on connaît votre engagement politique mais on ne vous connaît pas forcément. D’où venez-vous, quel a été votre parcours ?
Marisol Touraine : Après mes études à l’Ecole Normale Supérieure et à Sciences Po, j’ai passé une agrégation de sciences économiques et sociales. Vous voyez que mon intérêt pour les questions sociales est ancien et j’ai toujours pensé que l’économie ne pouvait faire abstraction du contexte social, ou plutôt que l’objectif de l’économie c’est quand même d’améliorer les conditions de vie de tout un pays. J’aurais pu devenir professeur, je suis devenue juge au Conseil d’Etat. J’ai toujours été passionnée par la politique, mais je ne conçois pas de n’avoir pas un métier par ailleurs. C’est le juge de l’indépendance ! Dans ma pratique de juge, je vois bien que la loi qui doit rassurer et protéger, apparaît parfois bien compliquée ! On vote trop de lois en France qui en fait ne sont pas appliquées ensuite. La droite ces dernières années a été championne toute catégorie dans cette supercherie : ses élus dénoncent la réglementation trop tatillonne, et jamais on aura autant voté de lois qu’au cours de ces cinq dernières années.
Mais vous avez aussi travaillé sur les questions internationales ?
M.T : Oui, et c’est même comme ça que je suis « entrée » en politique. A la fin des années 80, au moment où j’ai commencé ma vie professionnelle, on était en pleine guerre froide. Il me semblait que l’une des grandes questions était de savoir comment éviter les guerres. Cela reste vrai d’ailleurs. Michel Rocard m’a proposé de travailler avec lui sur ces problèmes, j’ai accepté.
D’où vous est venue cette passion pour la politique internationale ?
M.T : Si je suis rationnelle, je vous dirais que l’on ne peut pas comprendre ni agir dans notre pays sans s’intéresser à ce qui se passe ailleurs. Plus précisément, je crois que cette volonté de comprendre les autres me vient de ma mère chilienne. Je suis très attachée, évidement, à l’Amérique Latine. Mon premier choc politique, j’étais enfant, a été le coup d’Etat de Pinochet en 1973. Il m’en est resté l’envie de comprendre ce qui se passe ailleurs et l’idée qu’on ne doit pas rester inerte face aux crises du monde.
Etre une femme en politique, qu’est-ce que cela représente ? Et comment conciliez- vous votre engagement au PS, votre vie professionnelle et votre vie familiale?
M.T : Je crois qu’il y a autant de manières pour une femme d’être engagée en politique qu’il y en a pour les hommes. Margaret Thatcher et Ségolène Royal, ce n’est pas le même style, indépendamment des idées ! Marie-George Buffet et Michèle Alliot-Marie non plus ! Mais toutes les femmes, en politique, ont dû affronter le scepticisme au mieux, le machisme bien souvent. On ne pardonne pas à une femme d’avoir les yeux tirés au bout d’une nuit de négociation ou d’être mal coiffée alors que personne ne fera ce reproche à un homme. Quand on ne nie pas à une femme le droit de s’engager, c’est pour mieux demander : mais est-elle une bonne mère ? J’ai souffert de tout cela, comme d’autres. Comme beaucoup j’ai appris à ne plus m’en préoccuper. Mais pourquoi faut-il toujours se justifier quand les hommes, eux, se sentent « naturellement » investis ? La bataille de l’égalité entre les hommes et les femmes n’est pas encore gagnée, pas plus en politique qu’ailleurs. C’est ce combat là qu’il faut mener et pour moi, les femmes en politique doivent aussi symboliser la victoire sur les discriminations. Et le meilleur signe d’égalité, c’est de nous laisser, nous les femmes, choisir nos terrains d’engagement.Mais c’est vrai, le principal obstacle reste celui de la conciliation entre vie politique et vie familiale. J’ai été élue députée alors que mes enfants avaient entre 4 et 7 ans. Cela a supposé beaucoup d’organisation. Mais je n’ai jamais culpabilisé de mon engagement, car je pense que mes enfants étaient (et sont) heureux d’avoir une mère qui est une femme de conviction ; cela n’empêche pas quelques regrets, qui tiennent au sentiment de ne pas avoir assez profité de leurs moments d’enfants ! A chacun son truc et moi je m’étais fixé une règle, que j’ai réussi assez largement à respecter : le dimanche était consacré à ma famille. Lorsque j’ai été battue, aux élections de 2002, j’ai repris mon activité professionnelle, au Conseil d’Etat. D’une certaine manière, c’est cela le plus compliqué : lorsqu’il faut, en plus de l’engagement politique et de la vie familiale, travailler. Trois vies en une, cela commence à faire beaucoup ! C’est le lot de la plupart des femmes en politique, et c’est pour cela qu’elles attendent que leurs enfants grandissent pour se lancer. Les hommes, eux, se posent rarement la question. Il n’y a pas de remède miracle : et je crois au fond que c’est une bonne chose pour les électeurs que leurs élus soient confrontés aux mêmes problèmes qu’eux. Etre une femme en politique, c’est comme pour toutes les femmes se demander chaque jour comment on va réussir à tout faire !
Propos recueillis par Sonia Henriques
il faut voter NON le 4 fevrier prochain .la democratie et ma liberte individuelle en dependent.
le referendum est dans la constitution ,il faut s'en servir,c'est aussi le peuple que l'on baillonne.
Rédigé par : champion rene | vendredi 18 jan 2008 à 18:36