Quelques mots rapides, dans un contexte
dominé par ce que j’appellerai la bataille de la régulation.
Pas un jour ne passe sans que le Gouvernement n’explique que sa
priorité est au renforcement des régulations,
économiques, sociales, politiques. Pas un jour ne passe, ou
presque, sans que des actes en sens contraire soient annoncés.
Un exemple ? L’amendement Lefebvre, qui est en fait un
amendement UMP, à la proposition de loi sur le maintien et la
création d’emploi. Ce texte, par lui-même, a de quoi
susciter la critique : je le dis avec un peu d’étonnement
car il est porté par le député UMP Jean-Frédéric
Poisson, fort sympathique mais surtout attaché à des
valeurs sociales sincères. Or, que nous prépare sa loi,
dont la discussion a commencé hier à l’Assemblée ?
Rien moins que la disparition de garanties sociales qui empêchaient
les employeurs de tout imposer à leurs salariés :
face à la crise, nous dit l’UMP, il faut encourager le prêt
de main d’œuvre, les regroupements d’employeurs y compris de
grandes entreprises éloignées géographiquement,
et le télétravail. Concrètement, demain, un
salarié de Lille pourra être « prêté »
à une entreprise de Marseille, ou voir son temps de travail
partagé entre sa société et une autre de Tours !
Drôle de manière de concevoir la protection sociale,
alors que je suis persuadée que l’avenir réside dans
l’invention de nouvelles garanties face aux vicissitudes du marché
de l’emploi. C’est bien l’enjeu d’une véritable
sécurité sociale professionnelle.
Comme si cela ne suffisait pas, le
porte-parole de l’UMP a décidé de proposer que les
salariés en congé maladie, maternité ou accident
du travail, puissent « télétravailler »
pendant leur congé ! Enorme ! Ce ballon d’essai a
provoqué un tel tollé, que le Gouvernement a finalement
annoncé qu’il ne soutiendrait pas cette proposition. Mais il
est incroyable que la droite ait pu seulement penser à
proposer aux malades, aux femmes enceintes, aux victimes d’un
accident du travail, d’améliorer leurs fins de mois en
transformant leur chambre en centre d’appels ou en local
informatique ! C’est une régression stupéfiante,
qui illustre les dérives du « travailler plus pour
gagner plus » : heures supplémentaires,
travail du dimanche et maintenant travail des malades et des femmes
enceintes. Bientôt le travail des enfants ?
Je pourrais aussi évoquer la
crise du prix du lait. Là encore, l’enjeu principal est
celui de la régulation. La baisse des prix est venue de la fin
programmée des quotas laitiers définis dans le cadre de
la politique agricole commune et de la dérégulation des
marchés. Passons sur le fait que les organisations
professionnelles agricoles avaient hurlé contre la gauche,
lors de l’instauration des quotas laitiers en 1985 ; passons
( ?) sur le fait que la droite s’y est aussi opposée à
l’époque, au nom –déjà – de la liberté
des marchés ; mais que nous propose-t-on pour l’avenir ?
Michel Barnier, à l’Assemblée nationale, n’a pu
aujourd’hui s’engager à défendre le maintien des
quotas et les règles collectives. Il y a, à droite et
chez certains agriculteurs, une grande ambiguïté dans la
manière de réclamer la liberté de produire, tout
en demandant des prix régulés. La campagne européenne
est le moment où jamais, pour le Gouvernement, singulièrement
pour Michel Barnier, ministre de l’agriculture et tête de
liste UMP en Ile-de-France, de clarifier cette contradiction.
Cliquez ici pour lire la question posée par Jean Glavany à Michel Barnier.
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