De manière
assez caricaturale, on assiste depuis quelques semaines au retour, à droite, du
discours sécuritaire. N. Sarkozy s’est déplacé dans une école de banlieue pour
affirmer haut et fort qu’il n’accepterait pas la violence des bandes et
promettre une nouvelle loi sur le sujet ;
M. Alliot-Marie, après le désastre de Strasbourg, a promis la sévérité
et annoncé un nouveau décret, interdisant de manifester encagoulé ; le
Président, encore lui, sera à Nice mardi prochain pour assurer de sa
détermination à lutter contre toutes les formes d’insécurité…N’en jetez plus,
on le voit, la sécurité redevient un sujet politique majeur à droite, comme
s’il fallait renouer avec les recettes d’une campagne électorale victorieuse.
L’instrumentalisation de l’insécurité est de
retour. Dans un climat économique et social
délétère, qui a vu s’envoler les promesses électorales de N. Sarkozy, à
l’approche d’une campagne électorale (les européennes) difficile, compte tenu
de l’état de l’opinion, je crois que le Gouvernement a sciemment choisi de ressortir les discours qui ont fait leurs
preuves.
Le laxisme n’est pas de mise.
J’en ai un peu assez des discours caricaturaux selon lesquels la gauche serait
tolérante et la droite responsable. Personne ne peut se satisfaire, et
certainement pas moi, de la délinquance, de l’insécurité croissante qui règne
dans certains quartiers. Les statistiques sont formelles, loin de régresser,
l’insécurité progresse : depuis un an, ce sont les atteintes aux personnes,
surtout gratuites, qui augmentent le plus, ainsi que la délinquance financière
(sur internet). Quant aux actes commis par le grand banditisme, ils ont
littéralement explosé ! Les forces de l’ordre sont prises pour cibles,
jusqu’à essuyer des coups de feu, certains quartiers se ghettoïsent, devenant
inaccessibles à la police ou aux pompiers. C’est évidemment inacceptable. Il
faut rappeler que les premières victimes de violences sont les habitants des
quartiers difficiles, les citoyens modestes.
Ce bilan calamiteux est celui de N. Sarkozy.
C’est lui qui est directement en charge de la politique de sécurité depuis
2002. C’est lui qui en a fait, avec succès, il faut le reconnaître, un sujet
majeur du débat public. C’est donc lui qui est comptable des mauvais résultats
constatés année après année. Je trouve sidérant le culot avec lequel la droite
s’exonère de tout bilan et fustige la gauche, comme si c’était les socialistes
qui étaient au pouvoir !
La recette est toujours la même.
Au lieu de constater l’échec de sa politique, le Gouvernement, à chaque nouvel
épisode de violence, annonce le renforcement de son arsenal répressif. Une
nouvelle loi, un nouveau décret, de nouvelles directives, toujours plus
restrictives, sont mises en place. Sans plus de succès que les
précédents : 23 textes déjà sur la sécurité depuis 2002, sans effet
notoire. Il serait temps que la droite s’interroge sur sa politique, mette en
cause ses a priori et mette en œuvre
de nouvelles mesures.
C’est toute la chaîne qui va de la prévention à
l’application de la sanction, qui doit être revue.
L’insécurité et la délinquance appellent une réponse vigoureuse et
volontariste, mais une politique globale, qui prenne en compte la situation
dégradée de certains quartiers, qui soutienne les acteurs, notamment
associatifs, de la prévention, qui renforce dans la durée les moyens d’une
police de proximité (qu’on peut appeler autrement si le mot écorche la bouche
de N. Sarkozy, pour être trop associé à la gauche), qui permette à la justice
d’intervenir rapidement et garantisse que les sanctions seront effectivement
appliquées.
Pour la
droite, il n’est plus temps de gesticuler. Son bilan est mauvais. Mais pour la
gauche, il est urgent de sortir du piège dans lequel elle s’enferme trop
souvent : non, la politique de sécurité n’est pas réductible au
sarkozysme ; oui, il existe une politique alternative, de gauche, qui
allie fermeté, responsabilité, et prévention. Les mauvais résultats de la
politique de la droite devrait ôter à la gauche tous ses complexes en la
matière, et lui permettre de se saisir, enfin, de cette question centrale qui
l’a trop souvent fait chuter.
Cliquez ici pour lire l'article paru à ce sujet dans Les Echos.
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