Pour la
seconde fois, le texte revient à l'Assemblée nationale, après être passé devant
les sénateurs la semaine dernière. J'avais abordé la première discussion de
manière ouverte : je suis prête à soutenir une réforme qui aurait vraiment pour
but une modernisation des institutions de la Ve République. Simplement,
lorsqu'on voit le texte tel qu'il est aujourd'hui, le compte n'y est pas. C'est
pourquoi avec les socialistes, nous avons décidé de voter contre. Revue de
détail.
Quelques
aspects de la réforme s'avèrent positifs, qu'il s'agisse d'articles
correspondant aux attentes des socialistes, ou plus généralement de mesures
améliorées lors du passage au Sénat.
- Le fait d'étendre la maîtrise de l'ordre du jour
des séances de l'Assemblée au-delà du seul Gouvernement, tout comme
l'augmentation du nombre de commissions, la réévaluation du rôle de la Cour des
comptes et le retour au choix entre référendum et voie parlementaire pour une
nouvelle adhésion à l'Europe consacrent plusieurs des revendications
socialistes vis à vis du projet de réforme des institutions.
- Le délai de discussion des procédures
parlementaires est rallongé.
- La responsabilité du Premier ministre en matière
de défense nationale par rapport au Président de la République est désormais
assurée.
On peut
cependant observer à quel point les avancées sont maigres, alors que de
nombreuses mesures viennent consacrer un hyperprésidentialisme que cette
réforme devrait pourtant limiter.
- L'article 16, qui je le rappelle permet d'accorder
au Président des pouvoirs spéciaux (quasi-dictatoriaux) en cas de
« circonstances exceptionnelles », est ainsi non seulement maintenu
mais aussi plus simple à utiliser.
- La possibilité pour le Président de la
République de venir s'exprimer devant le Sénat et l'Assemblée nationale réunis
en Congrès est maintenue, ce qui n'est pas bon pour l'équilibre des pouvoirs.
- La possibilité pour 3/5 des parlementaires de
désavouer les nominations du Président de la République n'est que pure
formalité, compte tenu des rapports entre le gouvernement et sa majorité.
- L'amendement que nous avions voté en première
lecture qui inscrivait la protection des langues régionales dans la
Constitution, avait été supprimé par le Sénat. Nous l’avons rétabli, qu’en
sera-t-il lors les la 2ème lecture au Sénat la semaine
prochaine ?
- Le référendum d'initiative populaire, permettant
à une partie de la population de provoquer un référendum est rendu plus
complexe à mettre en œuvre.
- Il sera possible, si la réforme est votée,
d'adopter des lois par décrets dans les territoires d'outre-mer.
- La transformation du collège sénatorial en
fonction de la population est définitivement écartée par le Sénat, ce qui
condamne la gauche à y rester minoritaire.
- Enfin, et c'est l'un des points les plus
importants, l'idée d'un contrôle strict de la parole présidentielle dans les medias,
en incorporant celle-ci dans le temps de parole de la majorité, a été
totalement écartée du projet de réforme.
J'aurais
pu voter pour le texte si le Gouvernement avait accepté certains compromis. Or,
non seulement les nombreux aspects qui nous opposaient déjà à ce texte sont
toujours présents après le passage au Sénat, mais en plus de cela certains
aspects ont été durcis. La droite explique que les socialistes sont
immobilistes et ne veulent pas reconnaître les avancées acquises pour le
Parlement dans ce projet, mais il faut rappeler qu'en fait de droits
supplémentaires acquis, ils concernent la majorité. Sous la Ve République, le Gouvernement
a un lien fort avec sa majorité et tient donc un pouvoir trop important dans la
vie parlementaire. D'autre part les prérogatives de l'opposition ne sont
nullement renforcées (n'est pas retenu le droit de demander une commission d'enquête,
et la dernière rédaction va même jusqu'à limiter le droit d'amendement). Pourquoi
voter une réforme faite sur mesure pour renforcer les leviers de Président de
la République alors que nous avons vraiment besoin d’un Parlement plus fort ?
Cliquer ici pour lire la réaction de Marisol Touraine, dans La Nouvelle République, quant au résultat du scrutin lors du Congrès.
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