L'échec du Congrès de Reims
est affligeant. Aucune synthèse n'a été possible, ce qui signifie,
concrètement, qu'aucun accord majoritaire ne s'est dégagé sur une ligne
politique et une conception partagée du Parti. La commission des résolutions, à
laquelle je participais, s'est révélée incapable de faire émerger des
convergences, que ce soit autour du texte de Ségolène Royal ou de ceux de
Bertrand Delanoë, Martine Aubry ou Benoît Hamon.
Je
voudrais, avant d'en venir aux choix qu'il nous reste à faire, m'arrêter encore
une fois sur les enseignements du vote du 6 novembre et des débats à Reims.
Oui, il s'est exprimé une demande de renouvellement, des responsables et des
pratiques. Ce renouvellement est indispensable si l'on veut donner aux Français
une preuve que les socialistes ne constituent pas un monde à part mais sont en
phase avec la société. Oui, les militants ont demandé au Parti socialiste d'exprimer une vision politique et sociale cohérente,
radicalement différente de celle de N. Sarkozy. Sur ce plan, d'ailleurs, tous
les discours se sont retrouvés au diapason, à Reims. Mais je n'ai pas compris
qu'il y avait une majorité se revendiquant d'une autre démarche que celle d'un
réformisme assumé, européen et volontariste.
Un
conflit de légitimités. La difficulté dans laquelle nous nous trouvons
vient de ce que le vote du 6 novembre a permis de désigner la composition du
conseil national, le Parlement du P.S. Mais que le premier secrétaire sera
désigné au suffrage direct des militants, jeudi ou vendredi. D'un côté une
représentation à la proportionnelle, comme sous la IVème république, de l'autre
la présidentialisation de la direction comme sous la Vème : les deux logiques,
chacune fondée, entrent ici en conflit pour la première fois. La future
Première secrétaire n'aura pas de majorité acquise au conseil national.
Que
faire ? Il nous faut voter, jeudi, à la fois pour désigner la majorité
départementale et la direction nationale. Dans la mesure où aucun accord ne
s'est dégagé sur une ligne politique à Reims, je ne vois pas comment je peux
formaliser un appel à voter pour l'une des deux candidates en position de
l'emporter. B. Delanoë, avec hauteur, a préféré ne pas se maintenir dans la
course et ajouter ainsi la fragmentation à la confusion. Il est suffisamment
rare de faire passer l'intérêt général
du parti avant des ambitions personnelles pour le souligner. Mais cela
rend la position de la motion A difficile, à ce stade. Nous n'avons pas trouvé
d'accord à Reims sur une ligne politique. Choisir publiquement aujourd'hui
entre les deux candidates ne peut donc se faire sur la base d'une ligne
politique identifiée. Il appartient à chacune et chacun de déterminer, au
regard des attentes pour notre parti en termes de renouvellement des personnes
et des pratiques, d'affirmation politique, de capacité à mettre les socialistes
en mouvement en résonance avec la société, qui est le mieux à même de réussir
ce défi compliqué.
Au
niveau fédéral, la donne est différente. Elle ne s'est pas modifiée depuis le
congrès de Notre Dame d'Oé. La motion E est arrivée dans le département en tête
avec une forte avance, qui lui donnait la légitimité pour proposer un
rassemblement. Nous avons eu des discussions avec Jean-Patrick GILLE, qui a
entendu notamment notre demande d'une animation fédérale plus en phase avec les
différents territoires. Je l'ai déjà dit, les autres motions n'ont pas cherché
à engager un débat politique avec nous, même si des contacts informels ont pu
avoir lieu...après que je me suis étonnée, sur ce blog, de la constitution d'un
axe entre les motions C et D qui excluait, par principe, la motion A ! Je voterai donc pour Jean-Patrick GILLE et je
vous invite à faire de même. Parce qu'il me semblerait préoccupant que la
motion ayant recueilli 40 % des suffrages militants ne soit pas à la direction
fédérale ; parce que les motions C et D avaient d'emblée écarté toute alliance
avec la motion A. Je suis cohérente : comment voter pour le candidat d'une
motion qui a d'emblée écarté le principe d'une discussion politique avec ce que
je représente politiquement ?
Et
puis, un mot sur le candidat des motions C et D, Stéphane Corbin. Sa personne
n'est pas en cause, il est sympathique, agréable et habile politiquement. Mais
est-il sérieux que la fédération puisse être dirigée par un responsable des
services du Conseil général ? Je ne le crois pas, et je le lui ai dit. Pas plus
que par celui d'une grande ville, par exemple. Deux raisons pour cela
s'imposent à moi. D'abord, le socialisme municipal est ce qui a fait sombrer la
SFIO du temps de Guy Mollet. Le Parti socialiste, aujourd'hui, est tenté par ce
repli sur les territoires : les victoires locales sont satisfaisantes alors que
les victoires nationales font défaut. Il nous faut éviter toute confusion entre
l'action politique et la gestion administrative des collectivités locales. Je
ne suis pas certaine qu'il appartienne à une présidente de conseil général de
prendre position, depuis son bureau, pour un candidat au premier secrétariat de
la fédération. Par ailleurs, comment accepter que le responsable des services,
supposé appliquer les décisions politiques des élus, puisse les critiquer comme
premier secrétaire fédéral...ou ne pas les critiquer (dans nos débats internes,
évidemment) si elles le méritent ? La
situation, on le voit, n'est pas tenable, sans rien dire de la manière dont
serait mené le travail de désignation de nos candidats, par exemple aux futures
élections cantonales !
Il
faut que cette page se referme. Quelle que soit notre Première secrétaire,
vendredi ou samedi prochain, le temps de l'introspection doit s'achever et
celui du travail et de du rassemblement s'ouvrir.
Marisol TOURAINE
Post Scriptum : Personne
n'a souligné le fait que, demain, une femme dirigerait le PS. En soi, c'est
très positif, puisque cela signifie que cela va de soi. Mais à l'UMP, ils n'en
sont pas là ! Aucune femme ne préside une commission à l'Assemblée, par
exemple. L'une d'entre elles prétend à la présidence de la future commission
des affaires culturelles, et fait l'objet de beaucoup de pressions....Le P.S.
n'a quand même pas tout faux !
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